A la fin il ne peut en rester qu’un… ce props d'Highlander annonce une coexistence délicate entre les immortels de l’univers de Duncan MacLeod. Par rapport à cette situation, ceux de Naruto sont a priori favorisés : ils ne sont pas obligés de s’entretuer pour qu’un seul demeure à la fin. Une coexistence pacifique si l’on peut dire.

L’immortalité, le désir d’accéder à cette condition ont été abordés par Mikazuki, lors d’une chronique en deux parties que je vous invite à (re)lire : ici et . Cette réflexion (sur le temps, la fécondité…) sera en effet en toile de fond de ce qui va suivre.

Dans sa réflexion, Mikazuki avait placé l’accent sur les personnes qui voulaient devenir immortelles. Le manga offre également d’autres cas de figure : les immortels « malgré eux » qui vont plus particulièrement nous occuper.
 
Combien d’immortalités ?

La définition la plus courante de l’immortalité renvoie à l’idée d’échapper à la mort. L’être concerné peut vivre indéfiniment. L’éternel, l’infini est son domaine.

Immédiatement, les questions surgissent : le corps conserve-t-il le même état tout au long de la vie (infinie) de la personne ? Peut-il se dégrader ? L’immortalité concerne-t-elle le corps ? L’âme ? Les deux ? Être immortel est-ce synonyme d’invulnérabilité ? Dans le chapitre 673, Madara évoque directement cette idée en annonçant qu’il a désormais obtenu une immortalité totale, le rendant insensible à la défaite. Les prochains chapitres apporteront sans doute un démenti à ce propos…

Sa situation n'épuise pas les formes d'immortalité que le manga offre. Sans prétendre à l’exhaustivité, on peut en repérer six, chacune avec ses avantages et inconvénients :

 

  • Orochimaru et le transfert d’âme. Efficace mais il faut un réceptacle et si l’esprit de ce dernier l’emporte, Orochimaru se fait enfermer ;
  • Kakuzu : immortel… sauf si on détruit ses cinq cœurs ;
  • Hidan : une immortalité liée à Jashin. Résiste à tout, ressent la souffrance mais ne peut se reconstituer seul s’il est mis en morceaux ;
  • Les Bijûs : des êtres constitués de chakra qui peuvent être contrôlés (sharingan, Mokuton), scellés (dans un humain, le Jûbi…) ;
  • Les pantins : créés ou non à partir de personnes ayant vécu. Survivent à l’épreuve du temps, peuvent être réparées et se transmettre entre marionnettistes ;
  • L'Edo Tensei : un corps immortel, plus de problème de chakra mais il faut avoir déjà été mort pour être ramené. Pas invulnérable car la personne n’est pas maître de ses mouvements ; risque d’être scellé ; l’âme peut se libérer ; l’Edo Tensei peut être annulé.

On comprend alors l’intérêt pour les nations de posséder un Bijû ou encore les craintes inspirées par l’Edo Tensei. Pourtant ces éléments positifs sont loin de l'emporter : Pain l’invincible, celui qui se voulait Dieu, n’en demeurait pas moins mortel en la personne de Nagato. Les ninjas de l’Edo Tensei pousse cette logique encore un peu plus loin.

Immortalité : une bonne affaire pour qui ?

Les ninjas revenus parmi les vivants ne manquent pas d’atouts. Pourtant, un constat s’impose : aucun ninja immortel n’est entré dans les mémoires par ce seul fait. Les ninjas légendaires sont mortels.

De plus, l'Edo Tensei limite leur liberté d’action ; ils réagissent automatiquement, comme des machines (à tuer). Protéger son corps n’est plus une priorité (Zabuza déclare à Haku que son mur de glace ne sert à rien vu qu’ils se reconstituent) d’où un certain manque de réaction lors de certaines situations. Ils semblent moins alertes que les ninjas de chair et de sang.

Enfin, être sous l'emprise de l'Edo Tensei n’immunise pas contre la défaite : des moyens variés existent pour les vaincre (scellement…). Finalement, comme le montre la 4ème grande guerre des shinobis, l’Edo Tensei ne profite pas tant aux ninjas qui reviennent (la plupart est rapidement scellée) qu’à celui qui est à l’origine de la technique : sa renommée s’accroît et il est la cible de toutes les attentions.

Rien ne vaut la vie (limitée) (et donc la mort)

Ninjas instrumentalisés, pantins animés, c'est peu dire que ce retour des morts n’est pas bien vu (cf. les remarques de Kakashi, d’Hiruzen). Malgré la mauvaise réputation de l’Edo Tensei, Sasori accepte sa condition, pensant obtenir le corps qu’il désirait tant. Néanmoins, son esprit finit par se libérer suite à un échange avec Kankurô portant sur l’héritage du marionnettiste. Edo-Sasori n'était plus celui qu'il avait été, sa volonté était faible.

Le petit-fils de Chiyo avait ainsi fait son temps, un thème qui se retrouve non seulement lors des retrouvailles entre Kakashi et Zabuza, mais aussi dans la réaction de Sasuke à la proposition de Madara (chapitre 657) : ce dernier propose au frère d’Itachi une alliance ; ils sont les derniers Uchiha… Sasuke refuse, arguant notamment que Madara est déjà mort. Il est donc dépassé et ne saurait être considéré comme un Uchiha encore en vie.  

Ce « mort mais vivant » illustre également un aller-retour entre l’immortalité et la mortalité. Rappelons-nous : il s’est donné la mort devant Obito, s’attendant à être ramené à la vie par le Rinne Tensei, donc avec un corps mortel. De retour sous une forme immortelle il en vante les mérites en se libérant de l’emprise de Kabuto (chapitre 591). Pourtant l’excitation du combattant sera maximale lorsqu’il retrouvera « son » vrai corps (656-659) et donc la mortalité : sentir son sang couler dans les veines, son corps… un sentiment de plaisir qui n’a dû être égalé que lorsque Madara a senti Hashirama dans les environs.

Pour mener à bien son plan, Madara devait redevenir mortel, pour faire évoluer son corps contrairement à l’Edo Tensei qui fige l’état de la personne ramenée à la vie. Immortel et invulnérable, le Madara actuel réalise quasiment toutes ses potentialités, grâce à un support mortel... et à une grande solitude.

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L’immortalité pour désirable qu’elle soit ne fait finalement pas que des heureux : outre la dimension psychologique des retrouvailles (sur laquelle misait Kabuto et qui affectera, un temps, Chôji par exemple), les ninjas de l’Edo Tensei regrettent souvent d’être des outils qui ne contrôlent pas leurs mouvements. Partir lorsque son heure vient semble ainsi préférable, quand bien même revenir parmi les vivants permet de revoir des êtres chers (Dan et Tsunade) et d’aider les nouvelles générations comme évoqué dans une précédente chronique.