J'ai préféré le brouillard.

J'ai connu la lumière des froids matins d'hiver, les rayons de soleil caressant ma peau rugueuse, ces doux rayons triomphant enfin de l'obscurité glaciale de la nuit, apparaissant comme un salut après une nuit d'incertitude sur son propre destin, vécue debout, la mâchoire serrée, et la main crispée sur une épée, dans l'attente d'une réponse.

Mais j'ai préféré le secret du brouillard. Plus que devenir un homme, je voulais devenir un secret. Je voulais devenir un de ces mystères charriés et charmants. Enveloppant, étouffant, aveuglant le monde.  Brouillant. Soufflant ses repères. Puis se dissipant - parfois. Puis revenant, le lendemain. Encore, et encore. Infiniment. Je voulais être un mystère éternel, insoumis à l'idée de la disparition. Effrayant encore, des décennies plus tard. Voilà, voilà ce que je voulais être. Le brouillard est si beau pour qui sait mesurer ses charmes, si confortable pour qui sait l'épouser. Si silencieux, si discret. Si terrible.

Je suis le prochain acte, la dernière ombre sur ton existence. Le vent souffle sur ta joue, toi qui m'avais trop tôt oublié. Je souffle sur ta joue. Je vais bientôt t'envelopper, puis réapparaître. Pour, enfin, écrire la fin de l'histoire.